MANARA Milo

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Enfant de la Libération, Maurilio Manara est né le 12 septembre 1945 à Luson, petit village de montagne situé dans la province de Bolzano en Italie, dans une famille où ses deux parents sont ouvriers. Quatrième enfant d'une famille de six garçons Milo et ses frères commencent à faire de petits travaux dès l'adolescence afin d'être autonomes et à 12 ans, il réalise déjà des panneaux décoratifs sur commande.
Il grandit à Vérone où, suivant ses penchants naturels, il étudie à l’école d’art. Il commence ensuite à travailler comme assistant du célèbre sculpteur espagnol Miguel Ortiz Berrocal et entame en même temps des études d’architecture à Venise, qu’il finance en vendant des dessins de charme qu’il a crayonnés.
En 1966, grâce à l'épouse française de Berrocal, qui lui apporte de Paris les dernières bandes dessinées sorties comme Barbarella la vamp de l'espace de Jean-Claude Forest ou Les Aventures de Jodelle et Pravda les héroïnes pop art du Belge Guy Peelaert, Manara découvre la bande dessinée qui ne l'a jamais intéressé durant son enfance et son adolescence, en partie à cause des interdictions de sa mère. Ce qui le fascine, c'est la série de production du médium, plus proche de la littérature que de l'unicité d'une peinture, sans oublier les prix abordables des bandes dessinées qui permettent à un plus grand nombre de personnes de les acheter. Manara voit dans la bande dessinée une opportunité de construire son propre rôle dans la société, grâce aux normes salariales de l'édition qui sont plus honnêtes et plus proches de la réalité économique qui l'entoure que dans les arts. Il décide donc d'expérimenter ce nouveau langage en s'éloignant de la peinture pour embrasser la culture pop, plus proche des gens et se consacrer au dessin.
Il se met donc à la recherche d'un emploi de dessinateur à Milan, mais avec peu de succès compte tenu de la réticence des éditeurs à confier du travail à des artistes sans expérience professionnelle. Aussi, comme la majorité des dessinateurs italiens, il débute en tant qu’illustrateur sur des séries érotico-policières, en noircissant à la chaîne des pages de fumetti, ces fascicules bon marché qui font le bonheur des kiosques transalpins. Jusqu’à l'intervention de son ami Mario Gomboli qui le dirige vers l'éditeur Furio Viano en 1969, pour qui il dessine de nombreux épisodes de la série Genius.
Pendant toutes les années 70, il se fait la main et un style, passant de la satire au livre pour enfants, du feuilleton fantastique aux récits de pirates. Ainsi, il travaille pour les revues italiennes de l’époque comme le Corriere dei Ragazzi, puis il réalise en 1975 l’histoire politique Un Fascio di Bombe sur des textes d’Alf Redo Castelli et Mario Gomboli ou encore, de 1971 à 1973, il collabore avec le scénariste Francesco Rubino et conçoit pas moins de 48 aventures de Jolanda de Almaviva, aux éditions Erregi.
Avec Silverio Pisu il dessine en 1976 Lo Scimmiotto (Le Singe) pour Alterlinus le supplément de la revue Linus, sa première œuvre personnelle traduite en France par Charlie Mensuel et qui se fera vite remarquer par les éditions Casterman, ainsi que Alessio il Borghese Rivoluzionario qui marquent ses débuts avec la Bande Dessinée d’auteur.
Pour les éditions Larousse, il illustre de 1976 à 1978 cinq épisodes de L'Histoire de France en Bandes Dessinées. Un an plus tard, encore pour le même éditeur, il réalise deux récits de la Découverte du monde en Bandes Dessinées et participe l'année suivante au recueil collectif L'Histoire de la Chine. Suivent L'Homme des Neiges chez Dargaud en 1979 et, surtout en 1978, le déroutant HP et Giuseppe Bergman, son double graphique et son premier personnage à succès, créé, écrit et dessiné par lui-même et publié par la revue française À suivre. Les initiales HP ne sont autres que celles d'Hugo Pratt, à qui Manara rend là son premier hommage. Hugo Pratt retourne le compliment à Manara, en imaginant à son intention le scénario du formidable Été indien, pour lequel il reçoit en 1987 l'Alfred du meilleur album étranger au Festival d'Angoulême, puis celui du Gaucho que Manara terminera juste avant la mort de son mentor en 1993.
Au début des années 1980 il créé Le Déclic (en italien Un Gioco, Un Jeu) qui lui vaut immédiatement une réputation sulfureuse, mais qui lui permet surtout de remporter un immense succès et une notoriété planétaire. Avec, plus tard, Le Déclic n° 2 puis la création de son héroïne Miele, protagoniste du Parfum de l’Invisible et les histoires courtes Candid Camera, il devient le dessinateur érotique des années 80.
Pourtant son oeuvre ne peut être réduite à ses images coquines. La beauté érotique du trait cache chez Milo Manara un vrai discours sur la femme dont l'esthétique a fait école. Il y a du Caravage dans l'oeil de Milo Manara lorsqu'il pose le regard sur une femme et l'artiste sait toucher la sensualité de l'âme et goûter à son parfum entre deux courbes féminines.
Pour Federico Fellini, Manara réalise les affiches d'Intervista et de la Voce della Luna, avant de travailler sur deux scénarios de films qui ne seront jamais tournés par le réalisateur, Voyage à Tulum et Le Voyage de G. Mastorna.
En 1996, Manara emprunte aux Voyages de Gulliver sa Gulliveriana, alter ego très féminin et séduisant du personnage de Jonathan Swift. Puis, il fera dans le premier chapitre d'Aphrodite, l'illustration du roman sulfureux de Pierre Louÿs. Manara réalise aussi aux Humanoïdes Associés une adaptation en BD d'un roman antique et érotique, La Métamorphose de Lucius. En 2004, paraît aux Humanoïdes Associés, le 9ème tome des aventures de Giuseppe Bergman, L'Odyssée de Giuseppe Bergman.
En 1998 chez Casterman, sort Revoir les étoiles, qui conclue la réédition de l'Odyssée de Giuseppe Bergman. En 2007 Manara réalise, sur un scénario de Vincenzo Cerami, Les yeux de Pandora, un thriller diabolique où les secrets de famille se dévoilent au gré d'une action trépidante...
Après plusieurs prix et réalisations internationales, le 20 février 2009, l'Accademia di Belle Arti de Macerata lui décerne un diplôme Honoris Causa.
En 2011, chez Glénat, il débute son projet du Peintre et la Modèle et chez Albin Michel, c’est avec les textes d’Alejandro Jodorowsky qu’il se lance dans la reconstitution de la renaissance italienne qui lui est si chère et donne vie à la saga des Borgia bâtie sur des faits historiquement reconnus.
En 2015 sort pour Glénat son œuvre emblématique sur la vie du Caravage, qu’il considère comme son "saint protecteur", Caravaggio Volume 1 : The Palette and the Sword, qui relate les premières années du peintre à Rome. Le tome 1, présenté pour la première fois lors de la 17ème édition du COMICON à Naples, est l'un de ses ouvrages les plus réussis. Le Maître de Luson a passé un très long moment à explorer la figure du Caravage et la période historique dans laquelle il a vécu, ce qui lui a permis de créer une œuvre véridique et précise. Le second tome sortira en 2018 et portera sur les dernières aventures du grand Michelangelo Merisi.
À coté de sa propre production il travaille aussi pour DC Comics (avec Neil Gaiman sur une histoire courte de Sandman) et Marvel (avec Chris Claremont sur une histoire des X-Girls). Il réalise également des couvertures de variantes pour les comics Marvel, qui mettent en scène les héroïnes les plus importantes de l'univers Marvel, de Black Widow à Gamora en passant par la version féminine de Thor et la couverture très remarquée de Spider-Woman.
L'émergence de la communication multimédia amène l’artiste à diversifier sa production, ainsi il réalise des story-boards et fournit des conseils pour des produits publicitaires. Il faut également mentionner son soutien aux projets concernant le Web et l’informatique.
En 2016, il est lauréat du grand prix Saint-Michel pour l'ensemble de son œuvre et en 2019, la 46ème édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême lui consacre une grande exposition rétrospective retraçant ses cinquante années de carrière. En 2016, Milo Manara s'est frotté au modèle de la beauté éternelle, Brigitte Bardot, dont il a peint vingt-cinq portraits. Pour cet amoureux des arts, la femme fait tout simplement partie des paramètres fondamentaux de la représentation de l'humanité. Elle incarne à la fois nos racines terrestres et une forme de projection divine.
En 2019, Glénat publie Sublimer le réel, une rétrospective des 50 ans de carrière du maestro Manara.
En hiver, l’artiste vit dans sa maison à 200 mètres de la Piazza Erbe, la plus ancienne place de Vérone et en été, il déménage dans sa villa surplombant Sant'Ambrogio di Valpolicella.

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